CHAMPS ET PAPILLES : UNE AVENTURE FRANCILIENNE DU SORGHO POUR L’ALIMENTATION HUMAINE
- Marc Lohez
- il y a 3 heures
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Au Salon International de l’agriculture, les stands des régions et départements offrent l’occasion de belles découvertes ; on ne s’y attend pas forcément pour celui de l’Ile de France, mais c’est une erreur : le stand de « Champs et Papilles » permet de déguster toute une gamme de produits gourmands à partir du sorgho du Bassin Parisien et de discuter avec un entrepreneur passionné, Eudes Coutté. Lorsque Eudes reprend l’exploitation initiée par son arrière-grand-père en 2016, il prend conscience que sa superficie ne suffira pas à pérenniser le triptyque blé-orge-colza de la ferme, avec des céréales très dépendantes des marchés mondiaux où les débouchés pour les exportations françaises se réduisent de plus en plus. Il est également particulièrement sensibilisé à la fragilité de la ressource en eau dans le contexte des évolutions climatiques. Et cela n’épargne pas l’Essonne où se situe l’exploitation : un pisciculteur voisin confie à Eudes que la source qui alimente sa pisciculture a vu son débit baisser de 70% en un demi-siècle. Ces enjeux portent à se tourner vers le sorgho, résistant et rustique et dont les semences sont aisément disponibles en France contrairement à d’autres plantes avec des qualités similaires comme le fonio.
En 2024, Eudes Coutté s’associe à un autre exploitant pour tester de nouvelles variétés de semences fournies par une société provençale. Cet essai est d’autant plus incertain que la météo de cette année s’avère capricieuse et contrariante : en août, les sorghos accusent plus d’un mois de retard. La chaleur et l’ensoleillement de l’automne permettent toutefois aux plantes de se rattraper et la récolte peut s’effectuer… le 11 novembre. Ce sorgho miraculé, qui en fait illustre bien sa résilience, va permettre de poursuivre une gamme de transformations variées initiée deux ans plus tôt. Une coopérative locale – travaillant le sorgho pour l’alimentation animale – effectue le tri et le décorticage des graines.
Le sorgho est ensuite proposé en farine, en tartinades, en plats préparés mais aussi en préparation pour faire des muffins au chocolat. Champs et Papilles s’est également associé avec d’autres producteurs, comme P.H.C. Jus, également implanté en Essonne qui élabore une liqueur de sorgho à la robe ambrée et au taux d’alcool raisonnable. Un boulanger de Chartres propose quant à lui un pain mixte sorgho/blé à la fois savoureux, tendre et qui se tient bien.
L’énergie qu’Eudes Coutté a consacré à construire cette filière locale n’a d’égal que sa volonté à convaincre le consommateur de l’intérêt à se tourner vers le sorgho, pour son goût, ses qualités diététiques mais aussi la piste prometteuse qu’il représente pour l’agriculture des décennies à venir. Et populariser le sorgho n’est pas une mince affaire, par exemple dans le secteur des tartinables où de grands classiques se sont imposés dans le paysage de l’apéritif dinatoire. Attirer le consommateur, c’est d’abord l’accueillir à la ferme pour la vente dans le cadre de production, mais aussi proposer toute cette gamme locale dans les marchés de producteurs et les marchés aux plantes. C’est donc une filière locale ancrée dans le circuit court qu’Eudes construit dans le sud de l’Ile-de-France, des Yvelines (avec un troisième cultivateur de sorgho) à Melun : un laboratoire de la popularisation du sorgho pour l’alimentation humaine qui montre que l’Ile-de-France n’est pas en reste dans l’essor de l’exotisme de terroir.
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